Le sacrifice à l’aube de la sédentarisation. René Girard et le site néolithique de Çatalhöyük

Pour qui s’intéresse au village néolithique de Çatalhöyük, ce sont les fresques dégagées par James Mellaart en 1961 qui s’imposent – où l’on voit s’agiter et danser, autour d’un cerf, d’un auroch ou d’un sanglier surdimensionnés, une foule de chasseurs minuscules. René Girard, commentant ces images en 2006, sembla un temps privilégier la chasse au cerf. Interprétant deux d’entre elles dans le cadre de son anthropologie sacrificielle, il vit dans la violence frappant cet animal l’équivalent d’un lynchage. Le rituel cynégétique imiterait une scène originaire se répétant dès qu’une société entre en crise. On tentera ici d’enrichir cette interprétation en la confrontant d’abord aux recherches menées par Ian Hodder, en articulant ensuite le modèle de René Girard à celui d’une anthropologie plus précisément dédiée aux images, celle de Philippe Descola. On fera alors l’hypothèse que le passage des premières cellules domestiques hantées par les morts (restes animaux et humains dissimulés dans les sols ou les murs) aux maisons habitées par les images et vidées de toutes reliques, n’a pu s’opérer que par la maîtrise du sacrifice ; en d’autres termes, grâce aux rituels de chasse et aux nombreuses pratiques sacrificielles qui marquent l’aube de la sédentarisation.

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